• • • Lunettes sur le nez, j'essaye de passer incognito. Sur le B, j'vesqui qui les condés, le comico. Quand je sors en ville, il faut toujours que je sois discrète. Je n'ai pas envie d'être dérangée par des groupies adolescentes pré-pubères débiles pendant que je suis en train de me dé-ten-dre. C'est bon, si elles veulent une photo ou un autographe, elles peuvent aller en convention. Marre de me faire déranger sur mon temps libre. Bien sûr, je me doute bien que ce n'est pas juste avec une paire de soleil que je vais avoir l'air totalement différente, mais les gens sont assez intelligents pour comprendre que ça veut dire : ne pas déranger, merci. Enfin... Je l'espère. Je me rends au Peet's coffee and tea. J'aurai préféré aller à un bar, mais il paraîtrait que boire de l'alcool en matinée, c'est mal vu... Putain, ça me fait chier de devoir entretenir cette image de fille modèle. Bref, je dois retrouver Nastia. Cette fille, je la considère comme une... Amie ? A vrai dire, ça dépends des jours. Parfois je l'adore, parfois j'ai envie de lui foutre une bonne gifle. On a toute les deux grandit dans le même milieu. Nos vieux se connaissent, alors on s'est souvent côtoyées. Un truc à la style Gossip Girl. On s'adore, mais on se fait aussi des coups de putes. Je ne comprendrais jamais les femmes... J'ignore la voix dans ma tête et j'arrive au salon de thé. Nastia n'est pas là. Je soupire lourdement, elle est en retard et ça me fait chier... Dis celle qui est aussi arrivée avec trente minutes de retard. A croire qu'avoir une montre hors de prix donne toujours la mauvaise heure aux plus fortunés. Je m'installe à une table et commande un café et des scores. Je ne vais pas l'attendre non plus. Elle finit par se pointer peu de temps après. Je lui fais un signe de la main avant de lui offrir mon plus beau sourire. Complètement hypocrite. Je me lève et lui fais la bise. "Oh ma chérie ! Comment tu vas ? J'adore ta tenue aujourd'hui, c'est magnifique.” En vrai, je trouve qu'elle a l'air d'un sac à patates, mais bon... "Comment vont tes parents ?” Je demande en m'asseyant, reprenant une tasse de mon café.

• • • Avoir confiance en soi, c’est un sentiment que Nastia connaissait bien. Belle, riche et limite connue, la brune avait plus un égo surdimensionné qu’autre chose. Oui, elle aimait se vanter et descendre les rues de Santa Barbara le nez bien haut et fière que les gens la regardent. Elle rentrait tout juste d’une virée shopping à New-York et était rhabillé pour le printemps, enfin jusqu’à la semaine suivante du moins. Parader était une de ses activités préférées, mais ce qui était encore mieux, c’était de retrouver ses amis et d’être de vraies pestes ensemble. Enfin, amis est un bien grand mot. Lorsqu’on est aussi célèbre et riche qu’elle, avoir des amis était généralement superficielle. Un égo surdimensionné, je vous disais. Bloom était l’une d’entre elles. Nastia l’aimait autant qu’elle la détestait, mais ayant grandi ensemble, les deux femmes avaient grandi ensemble et elles avaient fait des conneries ensemble pour fuir l’image de perfection qu’on leur colle depuis le début.

Être à l’heure n’était pas quelque chose que Nastia savait faire lorsqu’il savait d’une situation mondaine. Professionnellement, elle était irréprochable mais pour les amis et les soirées, elle pensait que le monde n’attendait que son arrivée. Une vraie diva. Ou une princesse. Après tout, elle était la réincarnation d’une princesse russe, la jeune Anastasia Romanova.

Elle finit par arriver au salon de thé dans lequel elle pouvait constater que Bloom était déjà là. « Bloom ma belle ! Excuse-moi pour le retard, j’ai dû partager ma salle de bain avec la nouvelle greluche de mon frère. » Ce qui n’était pas faux. La jeune femme vivait toujours dans la maison familiale et la nouvelle copine de son frère avait décidé que la seule salle de bain qui valait son attention était celle de Nastia. « Je vais bien et toi ? Je te remercie, je suis allée faire un tour à Manhattan le week-end dernier. » D’une certaine manière, elle savait que ce n’était pas nécessairement vraie, mais elle fichait. Les deux jeunes femmes n’avaient pas vraiment le même style. « Toi aussi, regarde toi, mamma, tu pourrais être sur un podium en ce moment. » Bloom demandait des nouvelles des parents Boukov. « Ma mère passe sa vie au spa et mon père est toujours un connard. Rien ne change ! Et les tiens ? » répondit-elle après avoir commandé un thé.

• • • Ah Nastia ! Je ne sais vraiment pas quoi en penser. Il y a des jours où je l’adore surtout pour faire ta langue de pute. C'est vrai qu'ensemble, on a tendance à bien critiquer. Je pense que ceux qu'on connait sont rhabillés pour l'hiver. Le pire, c'est qu'on fait pareil sur l'une et l'autre quand on est chacune dans notre coin. J'offre mon plus beau sourire de faux cul à Nastia quand elle arrive à mes côtés. « Bloom ma belle ! Excuse-moi pour le retard, j’ai dû partager ma salle de bain avec la nouvelle greluche de mon frère. » Ergh ! Il n'y a rien de pire que de partager ses affaires personnelles avec quelqu'un que l'on connait à peine. Pour le coup, j'ai un peu de pitié pour Nastia. "Mon dieu. En plus je suis sûre qu'elle doit prendre un temps de dingue pour faire son ravalement de façade.” Je n'ai jamais vu cette fille. Je ne la connais pas du tout, mais j'estime d'un premier abord, qu'elle est laide et conne. Il ne fallait pas être une squatteuse de salle de bain ! Tu es vraiment un amour Bloom. Oui, je sais, merci ! « Je vais bien et toi ? Je te remercie, je suis allée faire un tour à Manhattan le week-end dernier. » J'ai une gueule de bois énorme, comme à chaque fois, mais je vais éviter de le lui dire. Ça donnerait matière à ce qu'elle en parle dans mon dos. "Oh super ! On est dans l'enregistrement de notre prochain album, il va être encore mieux que le prochain.” Pour une fois, je ne suis pas en train de mentir ou juste de me vanter. Je suis vraiment fière de ce qu'on peut faire. Il faut bien que tu sois fière de quelque chose. « Toi aussi, regarde toi, mamma, tu pourrais être sur un podium en ce moment. » Je ne sais pas si elle est honnête en disant ça, mais je prends quand même le compliment. C'est toujours mieux que d'être critiquée. Je passe une main dans mes cheveux, avant de toute pleine de fausse modestie. "Merci.” Quel magnifique jeu d'acteur ! Si je n'avais pas fait carrière dans la musique, j'aurai pu le faire au cinéma ! Après tout, c'est de famille... « Ma mère passe sa vie au spa et mon père est toujours un connard. Rien ne change ! Et les tiens ? » C'est assez ironique de voir que, malgré le fait qu'on ait l'air d'avoir une vie parfaite, on a toute les deux des parents indignes. "Maman est toujours le nez dans son verre et papa toujours un connard, tiens un point en commun.” Sur le coup, ça ne sert à rien de mentir. Nastia, elle sait ce que ça peut être d'évoluer dans ce genre de milieu et par moment, c'est mieux d'être honnête.

• • • Dans le milieu mondain, Nastia était la reine des vipères. Il lui était facile de tout voir, tout savoir, tout comprendre, sans qu’elle n’ait besoin de faire quoique ce soit. Elle savait tout sur tout le monde, en dehors de ce que certains pensaient d’elle. La princesse du monde sportif était également très douée pour soumettre les autres à sa volonté. L’une des rares personnes qu’elle respectait et dont elle ignorait probablement l’avis était Bloom. Elle se doutait que Bloom la critiquait autant que Nastia la critiquait et c’était l’une des choses qui l’amusait avec Bloom. Entre vipères, elles se comprenaient et cette relation était juste du pur fun entre eux. « Il faut bien qu’elle passe des heures à se ravaler la façade, tu verrais son acné. Pouah ! » En temps qu’adulte, Nastia avait parfois également de l’acné mais avec ses traitements de peau, ses journées au spa et ses produits pour le visage qui coutaient la peau des fesses, elle faisait tout pour éviter de ressembler à une télécommande, comme elle le disait si bien. Quelle petite créature superficielle qu’elle est ! « Oh j’ai hâte d’entendre cet album ! Je suis sûr qu’il sera incroyable ! » L’une des raisons pour lesquelles, elle avait voulu embaucher le groupe de Bloom pour faire une performance durant le dernier match de la saison, non pas parce qu’elle était une grande fan mais plutôt parce qu’elle connaissait Bloom et qu’elle savait que ça ferait une bonne pub. Elle avait dit à Pearl qu’elle aimait leur musique, ce qui n’était pas faux mais, elle n’en avait pas vraiment grand-chose à faire. Nastia n’était pas vraiment fan de musique, sauf lors de grande soirée. Le sujet passa sur leurs crétins de parents. « C’est beau comme nos familles sont similaires. Dieu merci, nous avons réussi à nous en sortir sans trop de dommages. » En réalité, Nastia avait de sérieux daddy issues, c’est-à-dire de gros problèmes à cause de son père. « Sinon, as-tu entendu la dernière de Santa-Barbara ? »

• • • Je jette un nouveau coup d'oeil à Nastia. Pour pouvoir la critiquer ? Mais nooooon ! Enfin... C'est juste que je n'aime vraiment pas son haut. On dirait qu'elle a pris le premier truc qui venait... Enfin, ce n'est pas le problème. Je sais bien qu'on est du même genre. Qu'on se critique l'une et l'autre dès qu'on le peut. Mais j'espère qu'elle m'apprécie quand même. Enfin, moi dans le fond, je l'aime bien. Mais dans le fond du fond, car tu es impossible d'aimer une autre personne que toi. Ceci est absolument faux ! J'aime bien les gens du groupe par exemple. Mais bon, je pense que je peux quand même définir Nastia comme une amie. Et une ennemie à la fois. On est des frennemies. Elle est ma Blair, je suis sa Serena. Elle est ma Rachel, je suis sa Quinn. Elle est ma Gabriella, je suis sa Sharpay. Elle est ma Jade, je suis sa Tori. Elle est... Oui, c'est bon, on a compris. En tout cas, on papote et comme d'habitude, on adore critiquer. « Il faut bien qu’elle passe des heures à se ravaler la façade, tu verrais son acné. Pouah ! » Je me marre, imaginant le tableau. Je remercie quand même mes parents de m'avoir fait avec une peau aussi parfaite et d'avoir échappé à l'acné. Enfin... Ma peau j'en ai aussi pris soin. Parfaite certes, mais ça demande du travail "Ouais, il faut qu'elle se maquille à la truelle en fait !” Je me demande quand même pourquoi Luther ramène autant de greluche. Je l'ai déjà croisé quelque fois, à force de traîner avec Nastia, et il mérite bien mieux que les têtes vides qui s'accrochent à lui. Enfin, je pense surtout qu'elles s'intéressent à son porte feuille... Le sujet se reporte sur notre album. « Oh j’ai hâte d’entendre cet album ! Je suis sûr qu’il sera incroyable ! » Je suis toute souriante maintenant et pour une fois, ce n'est pas un de mes sourires faux cul. "Bien entendu qu'il sera incroyable, on a bossé dur dessus." On peut dire que j'ai la grosse tête en disant cela, mais je pense vraiment ce que je dis. Cet album sera extraordinaire, point barre. Si on en est arrivé là aujourd'hui, aussi connu mondialement, ce n'est pas par hasard. On ne s'est pas roulé les pouces, on a bossé dur et surtout, les gens aiment ce qu'on fait ! Et maintenant, le sujet se détourne sur nos parents. Arrête de rouler autant des yeux Bloom, tu vas finir par te les bloquer « C’est beau comme nos familles sont similaires. Dieu merci, nous avons réussi à nous en sortir sans trop de dommages. » C'est beau, c'est beau... Je dois bien avouer que si ma famille avait été un peu plus normale, je n'aurais pas dis non. "Sans dommage, ce n'est pas dit ça..." Je ne dis pas si j'ai sorti cette phrase pour parler de Nastia ou de moi... Les deux surement. Je dois le reconnaitre, même si je suis parfaite, on ne peut pas dire que l'éducation de mes parents ne m'a laissé aucune trace. « Sinon, as-tu entendu la dernière de Santa-Barbara ? » Je me redresse, tel un suricate avant de dire avec un grand sourire "Nooooon ! Dis moi !"